Mesure du stock de carbone dans les sols: une première mondiale

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Cet indicateur de mesure du stock carbone dans les sols est notamment utile pour les grandes cultures.
L'INRAe et Planet'A, dont le siège est à Châlons-en-Champagne, sont à l'origine de cet indicateur utile tant pour les Etats que les agriculteurs. Photo: DR

Dévoilé à Châlons-en-Champagne, le premier indicateur mondial du stock de carbone dans les sols ouvre de nouvelles voies vers la neutralité carbone. Aux territoires, agriculteurs et consommateurs.

“Le bilan carbone, c’est comme un compte en banque: il y a des entrées et des sorties”, illustre Eric Ceschia, directeur de recherche à l’Institut national de l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe). Il faut notamment y intégrer ce qui vient de l’atmosphère (photosynthèse), la biomasse avec ce qui sort de terre et ce qui se décompose sur place tout comme les apports extérieurs. A l’heure où le label bas carbone et la taxe carbone exigent comptes et décomptes, pas évident à calculer. C’est dire toute l’importance de la mise au point, par la France, du premier indicateur mondial du stock de carbone dans les sols. On le doit à une équipe de chercheurs de l’INRAe et à Planet’A, le forum international de Châlons-en-Champagne dédié à l’agriculture comme solution. 

Dévoilé en avril 2021 dans la préfecture de la Marne, cet indicateur baptisé SOCCROP a comme unité de mesure le nombre de jours pour lesquels il y a une couverture au sol. Les chercheurs ont en effet établi un lien direct entre la durée annuelle de couverture végétale des sols cultivés et l’accumulation de carbone pour les grandes cultures en Europe. Son suivi est extrêmement précis, grâce aux satellites nouvelle génération. Observer, par exemple, que les cultures d’hiver fixent davantage de CO2 que celles d’été est une chose. Mais la nature des sols, la présence de couvert végétal, etc. introduisent en prime des variations. L’indicateur permet de faire “un inventaire au niveau national et européen des capacités de fixation de CO2, allant jusqu’à la possibilité d’établir un bilan carbone”, explique Eric Ceschia. 

« Demain, tout cela aura une valeur monétaire »-Arnaud Leroy, président de l’ADEME

Lors d’un débat organisé à la foire agricole de Châlons, début septembre, Alain Rennaud, président du conseil scientifique de Planet’A, en a résumé les enjeux: “C’est un outil qui a trois niveaux d’intérêt: territorial d’une part, pour les communautés, les régions, les Etats; D’autre part, pour les organisations agricoles qui se penchent sur ce que deviennent nos pratiques; Enfin, la mesure du carbone pourrait aussi être effectuée au niveau de la parcelle”. SOCCROP devrait être mis à disposition du monde agricole au début de l’année 2022. “Nous avons aussi la volonté d’essaimer au niveau mondial”, a complété la présidente de Planet’A, Carmen Munoz-Dormoy.

“Demain, tout cela aura une valeur monétaire. C’est une nouvelle donnée pour l’agriculteur, en plus de la possibilité de choix sur les pratiques culturales”, a poursuivi Arnaud Leroy, président de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise d’énergie). En août, le prix de référence des quotas de carbone européens a dépassé pour la première fois les 60€ la tonne (contre 25€ l’an passé). Agriculteurs dont on sait, par ailleurs, qu’ils sont déjà fortement tournés vers de nouvelles ressources financières via la production d’énergies renouvelables (agrivoltaïsme, méthanisation, etc.).

« Si on n’intéresse pas le consommateur, on n’arrivera pas à la neutralité carbone »-Maximin Charpentier, président de la Chambre d’agriculture du Grand Est

« Pour atteindre la neutralité carbone, le numérique va être indispensable car nous sommes entrés dans des systèmes extrêmement complexes avec les interactions entre l’eau, l’azote, le sol, le climat…”, a rappelé Maximin Charpentier, président de la Chambre d’agriculture du Grand Est. A cet égard, enchaîne-t-il, “l’agriculture est un des secteurs qui s’est le plus adapté à la numérisation”, en pointant dans la foulée l’autre défi: “Tout cela, c’est pour le consommateur. Si on n’intéresse pas le consommateur, on n’arrivera pas à la neutralité carbone”. Egalement président de Terrasolis, le pôle d’innovation de la ressource bas carbone installé sur l’ex-base aérienne de Reims, il a annoncé que l’association planchait sur un projet de récompense des consommateurs misant sur l’évitement de CO2 et ayant recours à la cryptomonnaie. Après tout, pourquoi le monde agricole et les consommateurs resteraient-ils hors jeu? “Le transfert de Messi s’est fait en partie en cryptomonnaie”, a-t-il conclu dans un clin d’oeil.